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The Incarnation : who creates and who embodies ?

19 Fév 2025
The Incarnation : who creates and who embodies ?

Lors de notre événement « AI & Creation : an Ally or an Alien ? » organisé dans le cadre de l’IA Summit, nous avons eu le plaisir d’assister à une intervention fascinante de Pascal Morand sur l’impact de l’intelligence artificielle dans la création artistique. Durant 15 minutes, il a exploré les questions fondamentales qui se posent aujourd’hui : l’IA peut-elle créer au même titre que l’humain ? Et surtout, peut-elle incarner une œuvre ?

Quand l’IA compose en secret

L’intervention a commencé par un cas troublant : celui du groupe Hail Darkness, fondé en 2020 par trois policiers en Arizona. Leur musique, inspirée de Black Sabbath et d’autres formations contemporaines, a conquis de nombreux auditeurs. Mais quelques semaines après la sortie de leur album, le groupe a révélé un secret : toutes les compositions avaient été réalisées par une intelligence artificielle. Ce « pillage créatif » a provoqué de vives réactions, soulevant une question cruciale : en quoi cette utilisation de l’IA diffère-t-elle du processus naturel d’inspiration des artistes humains ?

L’IA, une simple extension de la créativité humaine ?

Le débat ne s’arrête pas à la musique. Dans le domaine littéraire, Rie Kudan, lauréate du prix Goncourt au Japon a été récompensé pour son œuvre en partie écrite par une intelligence artificielle. Que ce soit en musique, en peinture, en écriture ou même dans le spectacle vivant, l’IA semble à présent inextricablement liée au processus créatif.

Mais si l’IA peut créer, peut-elle incarner une œuvre ? L’exemple de Hatsune Miku, chanteuse virtuelle japonaise, ou d’Alter 4, un androïde jouant dans un opéra de Keiichiro Shibuya au Théâtre du Châtelet, pose une question fascinante : une intelligence artificielle peut-elle être inspirée ? Son absence d’ego l’empêche-t-elle d’accéder à l’essence même de la création humaine ? Comme le souligne Pascal Morand : « La créativité ne repose pas uniquement sur la combinaison d’éléments préexistants, mais sur une intuition sensible, une vision propre à l’artiste. »

Création versus incarnation : une différence fondamentale

Si l’on formalise cette réflexion, trois éléments se distinguent :

L’intelligence humaine
L’intelligence artificielle
La création, qui peut ou non se confondre avec l’incarnation

Une œuvre artistique ne se limite pas à son exécution : elle repose sur une relation entre créateur et public, sur une esthétique propre, sur une signature unique. L’IA peut intervenir à toutes les étapes de ce processus, mais peut-elle véritablement porter une vision artistique autonome ? Pascal Morand nous invite à réfléchir à cette nuance : « L’IA peut être un formidable outil d’expérimentation, mais la singularité d’une œuvre vient du regard de son créateur. »

L’IA face à l’héritage artistique

Pascal Morand a cité plusieurs auteurs pour illustrer l’idée que la création humaine est indissociable de l’expérience sensorielle et du souvenir. Victor Hugo écrivait : « La clé, c’est se souvenir », tandis que Fernando Pessoa affirmait : « Je suis un gardeur de troupeaux. Le troupeau ce sont des pensées, les pensées sont des sensations. Je pense avec les yeux, les oreilles, les mains, les pieds et la bouche. », évoquant le lien entre l’esprit et le corps dans la création.
Sur la question de l’émulation entre les artistes, Diderot disait « Bénie soit à jamais la mémoire de celui qui en instituant cette exposition publique de tableaux, excita l’émulation entre les artistes, c’est le génie d’un seul qui fait éclore les arts, c’est le goût général qui perfectionne les artistes ».
Autant de citations qui soulignent l’enracinement profond de l’art dans le vécu humain.

L’IA et l’art conceptuel

Le droit de l’art s’intéresse aussi à cette question, notamment sur la notion d’auteur et d’œuvre collective. L’exemple de Ai-Da, un androïde auditionné à la Chambre des Lords : « Si l’art consiste à transmettre quelque chose de ce que nous sommes, je suis une artiste, c’est à l’artiste de reproduire le monde qui nous entoure. » Une phrase qui nous renvoie à l’art conceptuel de Duchamp et à son célèbre Urinoir : si une intelligence artificielle peut exécuter une œuvre, peut-elle en concevoir le concept ? Pascal Morand évoque ici l’importance du contexte et du geste artistique : « L’acte de création est indissociable d’une intention qui dépasse la simple production d’un objet esthétique. »

Conclusion : un débat ouvert

L’intervention s’est terminée sur une anecdote musicale originale : la présentation d’une version disco de « La Bicyclette » de Duchamp, démontrant une fois de plus que l’art est avant tout une affaire de contextes et d’interprétations.

Si l’IA est aujourd’hui un outil puissant pour la création, elle reste une extension de l’esprit humain plutôt qu’un artiste à part entière. Mais jusqu’à quand ? La question reste ouverte, et les réponses continueront d’évoluer au fil des avancées technologiques et des explorations artistiques.

Affaire à suivre…

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